"Adieu ami lecteur. Songez à ne pas passer votre vie à haïr et à avoir peur."
Stendhal

samedi 29 septembre 2007

Nicolas Sarkozy, vu d'Allemagne

Lu dans "die Zeit":

Europa stoppt den Überpräsidenten
Von Karsten Polke-Majewski und Alain Wurst
Nicolas Sarkozy hat mit seiner Kritik am Stabilitätspakt und an der EZB die Europäer verschreckt. Sie kennen nun die Methode des Präsidenten: Viel Wind, wenig Ergebnis.

Große Geste, wenig erreicht: Frankreichs Präsident Sarkozy
© JOHN THYS/AFP/Getty Images

En français cela donne approximativement:

L'Europe arrête l'Omniprésident
Nicolas Sarkozy a effarouché les européens avec ses critiques sur le pacte de stabilité et la BCE. Ils connaissent maintenant la méthode du président: beaucoup de vent, peu de résultats.


C'était en juillet déjà...

samedi 22 septembre 2007

Liberté d'expression et devoir de réserve: la problématique du blog du fonctionnaire

La question, qui est probablement un classique des dissertations de droit public, repose sur une tension existant dans le statut général des fonctionnaires entre 2 grands principes, l'un - la liberté d'expression - garanti la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789 et rappelé en préembule de la Constitution de la Vè République, l'autre - le devoir de réserve - institué par la juriprudence du Conseil d'Etat depuis 1935 (arrêt CE, 15 janvier 1935, Bouzanquet, Rec. p 44).



L'article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen édicte en effet que " la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre à l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par Loi ". L'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires garantit d'ailleurs " la liberté d'opinion au fonctionnaire ". Néanmoins, le droit administratif français impose un principe fondamental d'obligation de réserve à tout agent de droit public (fonctionnaire ou non), en tout temps et en tout lieu, même en dehors de l'exercice de ses fonctions. On peut définir ce principe comme l'obligation d'observer "une certaine retenue dans l'extériorisation des opinions des fonctionnaires sous peine de diminution de la notation et/ou de sanctions disciplinaires" (1) Si cette obligation ne figure pas expressément dans l'actuel statut général des fonctionnaires, elle a, en revanche, été consacrée par la jurisprudence dès 1935 (C.E. 11 janvier 1935, BOUZANQUET, Rec. p. 41) et a, depuis, été constamment réaffirmée (C.E. 28 juillet 1993, Mme MARCHAND, Rec. p. 248 ; C.A.A. de Nancy, 29 juin 1995, MARTIN, Rec, p. 866). Elle revêt un grand intérêt pratique dans la mesure où elle recouvre une grande variété d'hypothèses à l'occasion desquelles l'administration a eu matière à infliger sanctions disciplinaires et le juge saisi de celles-ci, dans l'exercice de son pouvoir de contrôle, a pu préciser ce qui peut être considéré comme des manquements à l'obligation de réserve.
S'il n'y a guère de difficulté à qualifier comme tel un comportement qui tombe sous le coup de la loi pénale du fait de sa gravité, comme, par exemple, des propos diffamatoires, mettant en cause d'autres fonctionnaires ainsi que l'organisation des services publics (C.E. 11 février 1953, TOURE-ALHONSSEINI, Rec. p. 709) ou l'offense faite au chef de l'Etat (C.E. 10 janvier 1969, MELERO, Rec. p. 24), dans la plupart des autres cas, il y a lieu de se référer à l'ensemble des circonstances de l'affaire. Pour ne pas s'étendre sur des cas peu probables en matière de blog, nous pouvons les classer grosso modo selon 3 axes:
- L'appréciation peut se fonder sur le niveau hiérarchique du fonctionnaire.
En effet, l'obligation de réserve est d'autant plus sévère que le grade du fonctionnaire est plus élevé (C.E. Ass. 13 mars 1953, TEISSIER, Rec. p. 133 - C.E. 10 mars, 1971, JANNES, Rec. p. 202).
- L'appréciation de la gravité du manquement peut aussi reposer sur la nature des fonctions exercées.
- Enfin, l'appréciation de la gravité du manquement peut également tenir compte du lieu d'expression des opinions.



Or le développement des blogs comme moyen de communication public et l'engouement qu'il suscite chez les fonctionnaires - dont je suis - repose avec force la question de la limite des propos qui peuvent y être tenus. Le 24 octobre 2006, le député UMP de l'Hérault Robert Lecou a ainsi adressé une question parlementaire au ministre de la fonction publique sur le sujet des blogs de fonctionnaires. Il demandait au ministre de préciser sa position sur les conditions dans lesquelles un fonctionnaire peut tenir un blog sur Internet. La réponse, publiée au journal officiel du 30 janvier 2007, n'apporte hélas aucune réponse satisfaisante à ce sujet. Elle ne fait que rappeler les principes évoqués ci-dessus - le ministre rappelle en effet que le devoir de réserve "ne connaît aucune dérogation, mais doit être conciliée avec la liberté d'opinion, et celle, corrélative à la première, de l'expression de ces opinions". Rien que l'on ne savait donc déjà. Et de conclure "En tout état de cause, il appartient à l'autorité hiérarchique dont dépend l'agent d'apprécier si un manquement à l'obligation de réserve a été commis et, le cas échéant, d'engager une procédure disciplinaire". L'art d'enfoncer des portes ouvertes, sans avoir vraiment répondu à la question...
Le problème reste donc entier. Toutefois, le Conseil d'Etat lui-même n'a eu de cesse d'assouplir sa jurisprudence. L'appréciation de l'obligation de réserve s'avère particulièrement difficile selon que l'on traite le cas d'un agent titularisé ou d'un fonctionnaire stagiaire (ex: cas des élèves à l'École nationale d'administration face aux médias). De même, le juge administratif peut se montrer d'autant plus clément que le fonctionnaire est éloigné des cabinets ministériels ou qu'il ne fait pas partie des hautes fonctions publiques.


Mais l'arrêt Malero cité plus haut ne manque pas de susciter l'intérêt suivant: un fonctionnaire peut-il, sur un blog, critiquer la politique du président de la République? En clair, après avoir chargé de façon ironique la candidate du PS, puis-je faire de même avec Nicolas Sarkozy (qui nous sert accessoirement de président)?
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Assemblée nationale : questions 12ème législature Question N° : 107547 de M. Lecou Robert (Union pour un Mouvement Populaire - Hérault) Ministère interrogé : fonction publique
Ministère attributaire : fonction publique
Question publiée au JO le : 24/10/2006 page : 10978
Réponse publiée au JO le : 30/01/2007 page : 1101 Rubrique : fonctionnaires et agents publics
Tête d'analyse : obligation de réserve
Analyse : blogs sur Internet
Texte de la QUESTION :
M. Robert Lecou attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique sur le développement important des journaux personnels sur Internet, appelés « blogs ». Ce nouveau moyen de communication et d'échange connaît un grand succès et des fonctionnaires ont ouvert, à titre purement personnel, des blogs où ils relatent leur vécu professionnel, leurs attentes, leurs joies et leurs déceptions. Récemment, deux blogs dont les auteurs étaient connus uniquement sous leur pseudonyme, celui d'un inspecteur du travail et celui d'un policier, ont fermé, l'un sur injonction de sa hiérarchie, l'autre préférant avoir une position officielle de l'administration avant de continuer. Il semble qu'il existe dans ce domaine une incertitude qu'il convient de lever, pour concilier la liberté d'expression et les obligations, notamment de réserve, qui peuvent incomber à un fonctionnaire en activité. Il lui demande donc sa doctrine sur les conditions dans lesquelles des fonctionnaires peuvent tenir un blog sur Internet.
Texte de la REPONSE :
L'obligation de réserve, qui contraint les agents publics à observer une retenue dans l'expression de leurs opinions, notamment politiques, sous peine de s'exposer à une sanction disciplinaire, ne figure pas explicitement dans les lois statutaires relatives à la fonction publique. Il s'agit d'une création jurisprudentielle, reprise dans certains statuts particuliers, tels les statuts des magistrats, des militaires, des policiers... Cette obligation ne connaît aucune dérogation, mais doit être conciliée avec la liberté d'opinion, et celle, corrélative à la première, de l'expression de ces opinions, reconnue aux fonctionnaires à l'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. L'appréciation du comportement d'un agent au regard de cette obligation varie selon plusieurs critères dégagés par la jurisprudence du Conseil d'Etat, parmi lesquels figurent la nature des fonctions et le rang dans la hiérarchie de l'agent, ainsi que les circonstances et le contexte dans lesquels l'agent s'est exprimé, notamment la publicité des propos. Il est à noter que la même jurisprudence étend l'obligation de réserve au comportement général des fonctionnaires, qu'ils agissent à l'intérieur ou en dehors du service. Dans le cas particulier du web log, ou blog, qui peut être défini comme un journal personnel sur Internet, la publicité des propos ne fait aucun doute. Tout va dépendre alors du contenu du blog. Son auteur, fonctionnaire, doit en effet observer, y compris dans ses écrits, un comportement empreint de dignité, ce qui, a priori, n'est pas incompatible avec le respect de sa liberté d'expression. En tout état de cause, il appartient à l'autorité hiérarchique dont dépend l'agent d'apprécier si un manquement à l'obligation de réserve a été commis et, le cas échéant, d'engager une procédure disciplinaire.



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(1) Wikipedia, article "Devoir de Réserve"


Sources:

Circulaire DAGEMO/BCG n°99-01 du 5 janvier 1999 relative aux droits et obligations des fonctionnaires et agents publics de l'administration du travail de l'emploi et de la formation professionnelle dans leurs relations avec les médias

Légifrance, loi du 13 juillet 1983

Journal officiel du 30 janvier 2007 (page 1101 pour ceux que ça intéresse).

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Je souhaitais tout d'abord remercier toutes les personnes qui me rendent visite régulièrement.
Ce blog en est toujours à sa phase expérimentale, et quelques scories sont encore présents, tant dans le paramétrage que dans la présentation. Une visiteuse m'a fait remarquer à ce sujet qu'il était impossible aux personnes non-inscrites sur "blogger" de laisser un message.

Cette erreur est maintenant réparée, tout visiteur est chaleureusement invité à me faire un petit signe du clavier, une critique ou tout simplement participer au débat!
C'était la moindre des choses que de vous en donner la possibilité sur un blog qui s'intitule "le forum et l'agora"!! ;-)

Mes excuses à tous ceux qui n'ont pas pu exprimer leur verve en ces lieux.
Amicalement,
Fabrice

lundi 17 septembre 2007

Rentrée littéraire... au PS aussi!!

"La défaite en chantant" de Claude Allègre, "L'élection imperdable" de Claude Bartolone ou "Au revoir Royal" de Marie-Noëlle Lienemann, autant de brûlots anti-Royal mais d'une douceur extrême comparés au pamphlet de l'austère qui se marre, celui qui ne cesse de revenir pour dire qu'il ne reviendra pas, pamphlet d'un pseudo simple citoyen qui s'intéresse un peu trop à une vie politique qu'il dit avoir abandonnée et dans laquelle il se complait à mettre le foutoir lorsque les affaires commencent à être rangées. Alors que le PS tentait de se remettre en ordre, Lionel Jospin nous livre donc son "impasse"(1) qui, à défaut de friser le prix Nobel frisera le ridicule! Après avoir laissé son parti dans la mouscaille, le voici en effet rejetant toute la responsabilité de l'éclatement de celui-ci sur la cloche sensée servir d'épouvantail à Sarko. Du coup celle-ci, qu'on n'avait guère entendu sonner ces derniers temps, se remet à carillonner depuis le Québec. Non du Vatican, même si le tintamarre pourrait le laisser croire. Lisez plutôt: "Au fond, ce qui me vient à l'esprit c'est cette parole de la Bible: 'pardonnez-leur parce qu'ils ne savent pas ce qu'ils font'. Donc, je pardonne à tous ceux qui m'agressent."

On pourrait dire avec Giono que "ça sent le rastaquouère, le dancing et le foutoir en plein air". Les métaphores médico-psychiatriques abondent en effet pour décrire la « santé » actuelle du PS: coma, asphyxie, état de panique, réactions atrabilaires, apragmatisme, sidération intellectuelle, stratégies de victimisation, positions dépressives entre plaintes et lamentations complaisantes, postures paranoïdes avec réflexes pavloviens d’épuration (excommunications, procès en sorcellerie pour trahisons, anathèmes vengeurs), procrastination, autodestruction, psychorigidité dogmatique et défensive, etc. Bref le diagnostique est sévère et le mal profond.(2) La question est donc double: 1- comment en est -on arrivé là? 2- À quel prix le PS peut-il encore sortir d'une crise aussi profonde?
Sur la première question, un livre paru le 10 septembre, écrit par le fabiusien Guillaume Bachelay, tente une analyse originale en ce qu'elle recherche les racines du mal non pas aux années Jospin, qui se sont soldées comme l'on sait, mais sur les 25 dernières années du Parti.(3) Il y suggère que le PS a deux visages, l'un social, l'autre libéral, qui se sont étouffés dans "le catéchisme de l'unité et la liturgie de l'unanimité" tuant dans l'oeuf tout débat stratégique. Et de répondre à la question du prix à payer pour sortir de cette impasse: "soit rendre les armes et pratiquer une sorte de social centrisme, soit tenir bon en se faisant accuser d'archaïsme".

Là où ce fabiusien voit une abdication, je vois pour ma part la révolution social-démocrate que la gauche française tarde à effectuer par rapport à ses homologues européennes, mais qui seule pourra à mon sens ancrer le parti dans la société moderne, libérale et mondialisée.




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(1) L'impasse, Lionel Jospin, ed. Flammarion
(2) cf Agora Vox, "Le Parti socialiste un parti (encore) utile aux Français ?", tribune libre
(3) "Désert d'avenir ?", retour sur 25 ans d'errance idéologique au PS , Guillaume Bachelay, ed. Bruno Leprince

Lucie


Ma petite puce née le mardi 11 septembre au matin. L'envie de lui rendre hommage, c'est par elle que je commence...